#.. Une première fois à tout [PV]

Une petite nouvelle, arrivée depuis peu. C'est une sensation assez étrange au début, et même plutôt gênante : plus de repères et, souvent, les moqueries qui fusent. Et en dix-huit ans de vie, c'était la première fois qu'Abigail y était confrontée. Toutefois, cela se passait pour l'instant plutôt bien : elle n'avait rencontré personne, encore. Et pour le moment, elle préférait ce calme à autre chose. Même si elle savait qu'un jour, il lui faudrait rencontrer d'autres élèves, de toute façon... Mais elle était plutôt de bon poil.

La veille, n'ayant rien à faire, elle ne s'était pas couchée trop tard – tout est relatif, comme qui dirait, n'est-ce pas ? Elle s'était couchée vers dix heures et demie, et s'était rapidement endormie, tranquille. Elle avait passé une bonne nuit, et le matin, s'était réveillée vers huit heures. Ça, elle ne manquait pas de sommeil, aujourd'hui ! Elle avait mangé dans le calme, une tartine de son bien aimé Nutella accompagné de jus d'orange, car elle n'avait pas été d'humeur à boire chaud. Elle avait pris sa douche et s'était habillée sans se presser, avait un peu regardé un dessin animé du genre Pokémon, ce qu'elle adorait xD, et était finalement partie à l'université. Pour la première fois. Et en entrant, elle eut un léger frisson.

La pièce était vide et très calme, luxueuse, très ouverte sur l'extérieur grâce à d'énormes fenêtres et donc très lumineuse. Elle avait de suite aimé l'endroit, à cause de cette luminosité. Elle avait fini par entrer, lentement, puis était restée plantée au milieu, son sac sur le dos, ne sachant trop que faire. Elle cherchait des yeux un plan, ou quelque chose, ou quelqu'un, qui lui permettrait de se repérer. Peine perdue. Elle avait finalement abandonné et ce fut à ce moment qu'il lui vint à l'esprit que, tôt ou tard, elle devrait passer sur le grill. Et comme elle ne connaissait pas ce genre de situation, cela l'effrayait. Elle soupira et souffla sur la mèche qui lui allait dans les yeux. Cela ne servit à rien, la mèche ne bougea que de trois millimètres à peine, et encore.

Et elle resta là, à se demander ce qu'il fallait qu'elle fasse maintenant. Et puis de toute façon, à quoi bon ?

Encore une journée comme les autres … Levé à sept heures, se doucher, s’habiller, se coiffer, se parfumer, prendre le bus, venir à pied, ou même en voiture pour certain ; aller en cours, attendre la pause de dix heures, puis celle de midi, et enfin rentrer chez toi, faire ses devoirs, aller un peu sur l’ordinateur, et se coucher pour recommencer le même baratin le lendemain. La vie parait parfois très répétitive, mais cela convenait à James. Peut-être qu’un jour il deviendrait un grand écrivain, et puis cette vie là n’est pas si déplaisante que ça au final. Si on y réfléchis bien, il y a pire sur terre, alors, autant se contenter de ce qu’on a.

James comme a son habitude traînait dans le hall, l’air pensif. Il lui arrivait plusieurs fois de se cogner contre des voitures, des panneaux, des gens, enfin vous voyez le genre … Il a parfois du mal à revenir sur terre. Mais cela lui donne un air mystérieux, dont les filles raffolent. Quoique James n’est pas du genre dragueur, c’est plutôt tout le contraire. Il était habillé d’une chemise blanche, surmonté d’une veste en cuir noire, et d’une chaîne tout ce qu’il y a de banal. Il portait un jean bleu classique, et des chaussures en cuir noir. Il avait mis son eau de Cologne favorite avant de venir. A sa main, un livre intitulé : Comprendre l’œuvre de Shakespire, un livre qui ma foi à l’air bien ennuyant, mais James suit des études des lettres, ce n’est pas toujours très drôle.

Il s’adossa contre un mur, et leva les yeux au ciel, sa tête frôlant la couche de béton, tout en fermant les yeux. On aurait dit qu’il était encore entrain de rêver, à vrai dire, après avoir dormi dans le bus, il avait encore la tête dans le cul.

Abigail était perdue dans la contemplation de ses grises chaussures. Elle suivait le tracé de ses lacets et ne se lassait pas de cette occupation stupide, comme à son habitude. Ses cheveux cachaient ainsi ses yeux. Une seule bretelle de son sac à dos sur son épaule, une main la tenant, elle ne bougeait plus, ne voyant aucune utilité à esquisser un quelconque mouvement. Elle resta là, immobile, pendant un sacré bout de temps. Elle ne savait que faire, était complètement perdue dans ce dédale de couloir comme elle l'aurait été dans n'importe quel autre établissement scolaire. Et elle attendait que quelque chose se produise, qu'un plan descende miraculeusement du plafond, qu'elle l'ait instantanément dans la tête ou, plus vraisemblablement, que quelqu'un se pointe et l'aide. Elle avait la flemme de chercher quelqu'un et de demander, aussi attendait-elle que quelqu'un vienne et lui demande ce qu'elle faisait là. Après tout, pourquoi pas ? On peut toujours espérer...

Elle n'eut pas à attendre si longtemps que ça. Elle aperçut soudain un mouvement à sa gauche et tourna la tête dans la direction de la chose qui provoquait ça. C'était simplement un garçon d'une maladresse plutôt amusante qui se cognait presque partout. Il était habillé d'une veste noire, une chemise blanche, un jean et des chaussures noires. Banal. Abigail jeta un coup d'œil à ses vêtements. Tee-shirt rouge avec un étrange smiley dessus, sweat noir, jean foncé et Converses grises. Banal aussi. Abigail, quoi.

Le gars s'adossa à un mur. Cette fois-ci, Abigail tourna franchement la tête dans sa direction et le dévisagea. Elle se demandait ce qu'elle devait faire ; le mec avait pas vraiment l'air décidé à faire le premier pas. Et tant pis s'il avait l'intention de ne pas ouvrir le bec de la journée : avec la jeune fille, c'était raté. Elle décida de faire le premier pas, consciente qu'en restant plantée là où elle était, elle n'obtiendrait certainement pas grand chose. D'un pas décidé, la jeune fille se dirigea vers le garçon. Arrivée à sa hauteur, elle lui lança :

« Hey, toi... T'pourrais pas m'aider ? »

[Moi non plus, c'est pas super long =/]

La jeune fille restait dans l'expectative. Elle attendait la réponse du garçon qui lui faisait face. Il n'avait pas l'air plus enchanté que ça d'adresser la parole à un quelconque individu. Mais Abigail le fixait de ses yeux d'un vert profond, qui contrastait exactement avec son tee-shirt rouge, et était bien décidée à ne pas déscotcher son regard avant d'avoir eu une réponse. Dans ce domaine là, elle était tout ce qu'il y a de plus têtu. Elle estimait que, lorsqu'elle adressait la parole à quelqu'un, ce quelqu'un pouvait lui répondre, même si c'était pour l'envoyer paître.

Elle regarda le garçon l'observer, en attendant toujours. Pas étonnant qu'il l'examine ainsi, vu le style de la maison. Ici, plus on s'habillait cher, mieux c'était, apparemment. Et surtout, moins on portait de tissu sur soi, mieux on était vue. Abigail l'avait très bien compris en voyant quelques filles sur le parking. Mais elle, même avec son simple col rond, elle avait l'impression de porter un décolleté. Franchement, quitte à s'habiller comme les poufs qui peuplaient l'université... Bah autant sortir nue, ce serait du pareil au même. Nue, et avec une peinture indienne sur le visage. Les filles étaient tellement maquillées qu'on ne connaissait même plus la réelle couleur de leur peau, leurs joues, leurs lèvres. Elles auraient pu être complètement blanches qu'avec la tonne de maquillage qu'elles avaient, cela ne se serait pas vu.

Enfin, le jeune homme répondit d'une voix polie. Tant mieux. Abigail n'était pas d'humeur à chercher la bagarre... Elle mit sa mèche derrière son oreille et répondit :

James est le genre de personne qui, à chaque fois qu’ils viennent de faire une nouvelle rencontre, « sentent » l’individu, ou pas. Et généralement, ce pressentiment s’avère exact par la suite. Malheureusement pour James, il y a plus de personne qu’il sent pas, que de personne qu’il sent. Mais cette fois-ci, c’était différent. La jeune demoiselle paraissait être une bonne personne, en tout cas différentes de toutes las garces qu’on rencontre dans le couloir. Enfin une fille non superficielle ! Bien qu’elle paraissiez bizarre, voire légèrement gamine sur les bords.

Cependant quand elle lui tendit la main, elle fit vraiment une moue bizarre, et James fut un peu déstabilisé. Il avait fait quelque chose de mal ? Il enleva sa main, et la frotta contre son jean, avant de la ranger nerveusement dans sa poche.

<< Et tu es le chevalier servant de toutes les dames de cette université ? >>
On ne pouvait pas vraiment dire ça, James avait beau être gentil, et serviable, il n’arrivait jamais à aller très loin avec les filles. Il était sans doute un incapable, qui ne comprends rien aux filles. D’ailleurs, il attends toujours que ce soit elles qui fond le premier pas. Or la coutume veut que ce soit le mec qui séduit la fille, et non le contraire …
- Juste des dames qui en valent la peine …
Cette phrase n’avait en aucun cas, le but de séduire la demoiselle, enfin, pour James … De toute façon il en aimait une autre.

Enfin la fille se présenta, elle s’appelait Abigail Cody, un nom vraiment rare, d’ailleurs James n’a jamais rencontré une personne se nommant ainsi auparavant. Il ne savait pas du tout comment prendre le « enchanté », un peu con sur les bords ? En effet.
- Euhh enchanté ?
Il se gratta la tête, par gêne.